Les Rebelles

« Romanesques et échappant à la norme, les rebelles échappent parfois autant à ceux qu’ils font trembler qu’aux historiens, pris par la longue compréhension des temps, de leur lenteur et de leur cheminement politique. Car saisir la rébellion nécessite de comprendre d’abord ce que chaque temps accepte comme « lot commun ». Mesurer l’écart, c’est connaître la norme. Hors-normes, les rebelles, des femmes et des hommes, au pluriel et dans cette forme féminine universelle que permet le double « l » français, ne constituent pas un groupe cohérent mais bien plutôt l’union de figures singulières et solitaires s’unissant parfois pour contester un ordre. Contestant tout en étant une part de la société, ils ne se confondent pas avec ce que l’on appelle dans les temps modernes l’avant-garde, n’annoncent pas nécessairement, en éclaireurs, la victoire de leur camp. Bien au contraire, ils sont souvent de grand vaincus. La trace qu’ils laissent n’est pas celle de leur victoire : ils marquent les esprits plus que les corps politiques.
Faire l’histoire des rebelles, c’est avancer avec ceux qui se soulèvent, comprendre comment émergent ces figures singulières, ce qu’elles mettent en avant. Les rebelles exercent leur liberté non sous la forme de la mobilité, mais sous celle de la résistance, obstinée, ils sont des réfractaires, de ceux qui résistent et s’attachent aux mondes anciens mais dans cette résistance ils peuvent devenir des producteurs d’utopies, inventeurs de mondes nouveaux. Ils font parfois mouvements, déclenchent des révolutions, entraînent à leur suite d’autres révoltés. Ceux-ci les rejoignent dans leur sécession ou suivent leur exemple par des cheminements incertains.
Charisme, émotion, conviction, la puissance du rebelle est de faire écho, par sa présence, son action et parfois sa mort, à la puissance de révolte et de libération d’autres femmes et d’autres hommes, à sa suite. L’une des questions qui se pose est alors forcément comment les rebelles deviennent ils une révolte, une révolution. Comment Spartacus entraîne-t-ils d’autres esclaves à sa suite, comment Jan Palach laisse-t-il en héritage Prague la révoltée de 1968 alors que les chars l’avaient déjà écrasée, comment Mohammed Bouazizi donne-t-il le signal de la révolution tunisienne…
Les rebelles sont objets d’histoire pour ce qu’ils font aux sociétés qu’ils habitent, ils marquent de leur empreinte la vie politique parfois – qui recèle quelques habiles rebelles –, et souvent bien plus durablement encore la culture à travers les arts : musique, littérature, peinture ou graffitis portent et transmettent les signes et les traces. Car si la rébellion est toujours politique par le fait qu’elle conteste un ordre, elle s’exprime pleinement dans l’ordre de la culture, des modes de vie et des modes d’être. Du dandysme au mouvement punk, en passant par l’affirmation zapatiste de la dignité rebelle indigène, les peuples des Zones Autonomes de Défense, les utopies ouvrières… les rebelles forment des mondes où l’on parle une autre langue, où les couleurs, les rapports aux êtres humains comme aux choses sont repensés, à rebours du commun et des puissants, à rebours de leur temps lui-même.
C’est autour de cette proposition que des historiens seront réunis à Blois cette année. »

Leyla Dakhli
Chercheure au CNRS
Membre du Conseil scientifique des Rendez-vous de l’Histoire 2014

entretien avec Jean Lacouture

Arléa

Itinéraire d'une femme hors du commun : d'abord l'une des responsables de la Résistance, chef du réseau Musée de l'homme, puis prisonnière de 1942 à 1945 à Ravensbrück. A partir des années 50, c'est à l'Algérie, au Maghreb et à l'ensemble du Moyen-Orient qu'elle consacre ses travaux d'ethnologue.


Le Livre de poche

Ce livre est le récit de ma longue lutte contre la peine de mort. Il commence au jour de l'exécution de Claude Buffet et de Roger Bontems, le 24 novembre 1972, et s'achève avec le vote de l'abolition, le 30 septembre 1981. Depuis lors, l'abolition s'est étendue à la majorité des Etats dans le monde. Elle est désormais la loi de l'Europe entière. Elle marque un progrès irréversible de l'humanité sur ses peurs, ses angoisses, sa violence. A considérer cependant les exécutions pratiquées aux Etats-Unis, en Chine, en Iran et dans de nombreux autres pays, le combat contre la peine de mort est loin d'être achevé. Puisse l'évocation de ce qui advint  en France servir la grande cause de l'abolition universelle.
Robert Badinter


Tempus Perrin

12,00

" Georges Clemenceau fut l'homme aux quatre visages : le Tigre qui fait tomber les ministères, le dreyfusard qui mène pendant neuf ans le combat du droit et de la justice, le premier flic de France qui, trois ans durant, dirige d'une main de fer le ministère de l'Intérieur, enfin le Père la Victoire qui conduit le pays à l'armistice avec l'Allemagne. Ce radical, d'abord haï par la droite pour son anticléricalisme, puis par la gauche pour son sens de l'ordre et sa lutte contre le pacifisme, est un homme apparemment contradictoire, qui se définissait lui-même comme un " mélange d'anarchiste et de conservateur ". Du premier, il avait la passion de la liberté, la philosophie individualiste, le dégoût de la " caserne collectiviste ". Du second, l'amour de la patrie, le respect de la propriété, une certaine forme de pessimisme - celui de l'homme d'action - sur la nature humaine. "
Michel Winock


Fayard/Mille et une nuits

Bakounine a un avantage : il n'a jamais été canonisé. Pourtant, sa vie et son œuvre sont indissociables du mouvement révolutionnaire européen. Premier grand théoricien du courant anti-autoritaire, son intransigeance lui valut l'inimitié de Marx et de ses épigones.
Dieu et l'État représente une excellente synthèse de la pensée de Bakounine. Le temps est peut-être venu de lire ou de relire ce « penseur agissant ».


La liberté à tout prix

Sylvie Brodziak

Classiques Garnier Multimédia

Une anthologie présentée par Sylvie Brodziak
« Tombeur de ministères », « Tigre », « premier flic de France », « Père la Victoire »… La carrière de Georges Clemenceau fut longue et elle a marqué l'histoire de France et de l'Europe depuis le Second Empire jusqu'à la veille de la crise de 1929. Tour à tour enfermé dans Paris assiégé en 1870, maire sous la Commune, médecin des pauvres à Montmartre, député, sénateur, dreyfusard, journaliste, écrivain, ministre de l'intérieur, président du Conseil, constamment en mouvement, on l'a jugé souvent insaisissable et contradictoire. Son unité vient d'ailleurs : il a porté, contre tous les conformismes, un individualisme farouche, servi par un courage rare. Au service du patriotisme, de la République, de la beauté, de la justice, des droits de l'homme, de l'anticolonialisme, de la santé et de la culture pour le peuple, dans tous les ordres de la pensée et de l'action, il se rebella sans relâche, parfois injuste mais toujours sincère, contre la fausse évidence des lâchetés et des compromissions.
Les Rebelles :
Hommes d'action, écrivains, penseurs ou artistes, ils ont un jour rompu avec les accommodements, les mensonges ou les préjugés de leur temps pour faire de leur vie un combat. S'ils se sont également battus avec la plume, c'est qu'ils étaient convaincus du formidable pouvoir des mots pour éveiller les consciences, résister à l'oppression et transformer le monde. Leurs écrits n'ont rien perdu de leur force ni de leur justesse, et restent des manuels d'insoumission pour les temps présents.
Une collection dirigée par Jean-Noël Jeanneney