GRAND MAëTRE

Jim Harrison

Flammarion

  • Conseillé par (Libraire)
    22 octobre 2012

    Dérive existentielle et vieillesse

    L'inspecteur de police fraîchement retraité, Sunderson, fait tout pour coincer le « grand maître », gourou d'une secte pseudo-libertaire, un peu trop porté sur les préadolescentes.

    Les sectes et leur triangle infernal sexe-argent-religion font sombrer des gens apparemment normaux dans la folie. Au point de confier leurs biens et leurs enfants à des charlatans pervers : l'écrivain réussit parfaitement sa critique du puritanisme et la défense la liberté la plus totale pour peu qu'elle préserve la dignité humaine et l'intégrité des enfants.
    Attention, le sous-titre est "faux roman policier" : alors ne nous y trompons pas !

    Humour caustique et irrévérence... Qui c'est le "grand maître" ?


  • 18 octobre 2012

    Un beau regard sur la retraite

    Sunderson est un homme à l’automne de sa vie, soudain désoeuvré sans le travail qui régissait sa vie à tel point qu’il lui a fait perdre sa femme. (« Elle lui avait dit : « Ta profession consiste à découvrir ce qui cloche et tu l’exerces depuis si longtemps que tu n’es plus capable de voir ce qui va bien dans la vie. » » (p. 149)) Sunderson, rattrapé par son vieil insctinct de flic décide de mener une dernière enquête en neutralisant le chef d’une secte soupçonné de détournement de mineures. Il traque l’homme aidé par sa jeune et affriolante voisine, elle-même mineure, Mona.

    Mais au-delà de cette dernière mission, il va surtout apprendre à s’adapter sa nouvelle vie et aux plaisirs assouvis ou fantasmés qui emplissent désormais exclusivement son univers. Il va apprendre à aimer la liberté en jouissant des plaisirs simples de la vie : une boisson fraîche et alcoolisée, un bon repas et une belle partie de jambes en l'air...

    «Il dormit les deux premières heures et se réveilla avec l’étrange impression d’avoir été écrabouillé, une sensation tout à fait nouvelle, pas exactement comme un animal écrasé sur la route, plutôt comme un homme dont les contours ont été brouillés, dilués par la perte de la profession qui le définissait jusque là. (…) Il n’était plus personne, mais il était libre. » (p. 61)

    Sa quête de Dwight est plus une dernière errance dans les antichambres de la violence et de l’immoralité qu’une véritable enquête. Grand maître n’est pas un roman policier, il est un roman su un homme qui tourne une page et apprend à apprivoiser sa retraite.

    « Je viens de feuilleter The Practice of the Wild de Gary Snyder et d’y lire : « La marche est l’équilibre exact entre l’esprit et l’humilité. » Je ne suis pas sûr de bien piger ce qu’il veut dire, mais au cours d’une marche de deux ou trois heures la première demi-heure est saturée de banalités mentales sans intérêt, puis on émerge soudain dans le paysage et l’on est simplement un bipède humanoïde qui avance dans les collines et les forêts enneigées, ou le long des plages gelées du lac Supérieur. On n’essaie même pas de comprendre cet immense plan d’eau, car on n’est pas censé le faire. » (p.284)